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histoire de la littérature - Page 6

  • La Boétie, l’ami de Montaigne

    la Boétie.jpgNé à Sarlat (Dordogne) en 1530, conseiller au parlement de Bordeaux, Etienne de la Boétie est surtout connu par l’amitié célèbre qui l’unit à Montaigne. Celui-ci en effet tenait en haute estime le génie autant que le caractère de son ami.  Une mort prématurée (en 1563) ne permit pas à La Boétie de remplir toute sa destinée et sans doute d’enrichir son œuvre.

    Il ne nous reste de lui, outre des poésies latines et françaises et des traductions de l’Economique de Xénophon (traduite par La Boétie sous le titre de la Mesnagerie), du livre 1 de l’Economique d’Aristote (retrouvée et publiée seulement en 1600), et deux opuscules de Plutarque , les Règles du mariage et la Consolation à sa femme,  qu’une dissertation intitulée Discours de la servitude volontaire.  Celle-ci est quelquefois désignée sous le titre Le Contre un, qui n’a été publié en partie d’abord, puis complètement, qu’assez longtemps après sa mort (vers les années 1574 à 1576), par les protestants dans un intérêt polémique.

    Cet opuscule, que La Boétie écrivit très jeune, est plus intéressant pour le littérateur et le philologue que pour le politique. On chercherait vainement en effet dans cette œuvre quelque théorie précise et approfondie touchant le gouvernement des Etats. La Boétie se borne à traiter en français, avec ampleur et véhémence, les avantages de la liberté et les inconvénients de la tyrannie.

    Cela dit même si certains ont pu penser, compte tenu du choix du sujet traité, que le jeune écrivain a voulu faire part de ses sentiments profonds, il ne semble pas qu’il y ait lieu de chercher dans ce petit livre aucune allusion à la situation de la France à l’époque des guerres de religion. En fait, le Discours de la Servitude volontaire nous permet, au même titre que les traductions d’Amyot, de La Boétie lui-même et de plusieurs autres, de juger des progrès de la langue française, à laquelle ces divers auteurs réussissent à faire exprimer les idées élevées que les langues anciennes avaient si bien su rendre.

    Michel Escatafal

  • Jodelle, le Sophocle de la Pléiade

    jodelle.jpgEtienne Jodelle,  né à Paris en 1532 et mort en 1573, se réserva d’être le Sophocle de la pléiade, comme Ronsard en était l’Homère et le Pindare. En effet, bien qu’ayant publié un grand nombre de poésies diverses, c’est surtout à ses essais dramatiques qu’il dut sa renommée.

    Sa Cléopâtre captive (1552) est la première tragédie originale d’un poète français qui ait été représentée en France. Elle le fut devant Henri II, et Jodelle et plusieurs poètes, ses amis, en remplissaient les rôles. Elle connut un succès foudroyant qui dépassa de beaucoup sa réelle valeur littéraire.

    Le même jour, après la tragédie, fut représentée sa comédie d’Eugène divisée à la manière des comédies anciennes  mais qui, par le sujet et la versification, rappelle plutôt les farces du Moyen-âge.

    Le théâtre de Jodelle comprend encore une tragédie, la Didon se sacrifiant, où l’auteur reprend en partie Virgile, chantre des malheurs de Didon, mais avec des couplets plus déclamatoires et diffus que le beau texte de Virgile.

    Après avoir été le brillant organisateur de tous les plaisirs de la cour, Jodelle mourut dans la pauvreté délaissé par tous ses amis. Toutefois il restera dans la littérature française comme le premier à avoir introduit l’alexandrin au théâtre.

    Michel Escatafal

  • Le roman au Siècle d’Or en Espagne

    velez de guevara.jpgNous avons déjà  évoqué  dans une note précédente deux formes de roman,  pastoral et  picaresque. Le roman pastoral, distingué, sentimental  a pour particularité d’être aussi  quelque peu ennuyeux. Le modèle du genre fut la Diana de Jorge de Montemayor (vers 1550). Cervantes écrivit la Galatea (1585) et Lope de Vega la Arcadia (1598).

    Le roman picaresque, pour sa part, a des caractères bien définis : forme autobiographique du récit, celle-ci étant  la seule relation entre des épisodes isolés, environnement populaire ou règne l’oisiveté et la lutte pour la vie. Cette forme de roman est aussi marquée par un certain cynisme, une forme de stoïcisme et une férocité non dissimulée que l’on retrouve à  travers une satire sociale impitoyable. En fait, ce genre d’œuvre est  la continuation en prose des poèmes satiriques et autres « danses de la mort » du Moyen-âge.

    Le prototype du genre après la Celestina est le fameux Lazarillo de Tormes (1554) d’auteur inconnu. Il est particulier par son réalisme puissant, la sobriété des moyens et des effets, l’exactitude et la sûreté des traits, la simplicité élégante du style, le relief de tableaux  peints avec une admirable assurance.

    Le second roman picaresque par ordre chronologique est la Vida del picaro Guzman de Alfarache (1599) de Mateo Aleman (1547-1614), roman remarquable  où s’entremêlent de longs passages moralisateurs et d’interminables histoires, sans parler des multiples digressions dans lesquelles l’auteur se complaît. La langue qui abonde en idiotismes populaires est très belle.

    En 1605, Francisco de Ubeda publie La picara Justina, au style à la fois très recherché et présomptueux.

    El Buscon  (aventurier) de Quevedo, écrit en 1603 et publié en 1626, à la fois spirituel et cynique, amer et sans la plus petite mesure, où abondent les épisodes burlesques et les traits les plus audacieux, tout cela donnant de cette caricature géniale, une des œuvres maîtresses de l’auteur et du genre.

    Quelques unes des Novelas ejemplares (1613)de Cervantes pourraient figurer dans la présente notice. Toutefois, « ces romans exemplaires »  contrastent notablement avec  les précédents par un humour souriant, un ton à la fois optimiste et frondeur, mais aussi une grande sobriété dans l’expression.

    La Vida del escudero Marcos de Obregon (1618) de Vicente Espinel (1550-1624), à la fois romancier, poète et musicien, est une autobiographie de l’auteur, authentique héros de l’époque picaresque. Ce récit très mesuré, entrecoupé de contes s’acheve  par un éloge de la conformité ou la résignation stoïque, la plus picaresque des vertus.  Cette oeuvre est un des meilleurs romans picaresques.

    Il faut aussi mentionner entre autres, El donado hablador au ton très sarcastique et  Alonso mozo de muchos amos (1626) de Jeronimo de Alcala (1563-1632), mais aussi El Diablo Cojuelo (1641) de Luis Velez de Guevara (1579-1644), modèle du Diable boiteux de Le Sage, et le fameux Estebanillo Gonzalez, hombre de buen humor (1646), autobiographie fantastique de l’auteur Esteban Gonzalez, dernier roman picaresque présentant un intérêt.

    Enfin, beaucoup de textes, et entre tous le très  formel  Guia y Aviso de forasteros (1620), œuvre de mœurs attribuée à  Linan y Verdugo, ont été écrits  pour prévenir les candidats des pièges de tout ce qui est « picaresque ».  El dia de fiesta por la manana y por la tarde (1660) de Juan de Zabaleta, est un échantillonnage notable des genres de l’époque où la coquinerie se manifestait partout y compris dans les églises, qui étaient devenues de véritables lieux de rencontre.

    Michel Escatafal

  • Rémy Belleau, le peintre de la nature

    Rémi Belleau.jpgRémy  Belleau, né à Nogent-le-Rotrou en 1527 ou 1528, mort en 1577, était « gentilhomme françoys », ce qui signifie qu’il était assez noble d’origine pour posséder des armoiries. Il accompagna en 1557 René de Lorraine, marquis d’Elbeuf, général des galères,  notamment à l’expédition de Naples. Plus tard il devint gouverneur de son fils Charles, marquis, puis duc d’Elbeuf, et dut à la protection de cette grande famille de pouvoir se livrer tranquillement à la poésie. Avec Ronsard, Baïf et Du Bellay, il suivit les leçons de Daurat au collège Coqueret.

    Après avoir commenté le second livre des Amours de Ronsard (1560), il publia lui-même, outre des poésies diverses, odes, sonnets, chansons, etc., une traduction en vers des Odes d’Anacréon (1555)  que certains ont osé comparé à l’original, les Petites Inventions (1571), et les Amours et nouveaux eschanges des pierres précieuses,  recueil de poésies à la fois érudites et descriptives. A cela s’ajoute la Bergerie (1565-1572), espèce de vaste églogue, divisée en deux journées, et qui n’est en réalité qu’un recueil de pièces diverses, composées à des époques différentes, mais reliées entre elles par quelques pages de prose. Enfin on n’oubliera pas la comédie de la Reconnue (publication posthume en 1577).

    Très estimé de ses contemporains, Rémy Belleau ne peut–être comparé ni à Ronsard qui l’avait appelé « le peintre de la nature », ni à Du Bellay. Cependant on peut encore admirer à juste titre, et plus encore que la gentillesse de son imagination, la précision de son vocabulaire et la souplesse élégante de sa versification.

    Michel Escatafal

  • Théodore de Bèze : un auteur aux croyances exacerbées

    de Bèze.jpgNé en 1519 à Vezelay dans l’Yonne, mort en 1605, Théodore de Bèze se rendit en 1548 à Genève pour faire profession publique de calvinisme, après avoir abjuré le catholicisme. Il fut d’abord chargé de l’enseignement de la langue grecque à Lausanne et publia plusieurs ouvrages, tous inspirés par ses croyances ou par le désir de les défendre.

    Il mit en effet à leur service un talent poétique qui, dans sa jeunesse, l’avait déjà fait apprécier en France, et publia, outre plusieurs ouvrages de controverse, Abraham sacrifiant, œuvre austère, à la fois enflammée et sobre, courte tragédie française (1550) ayant pour particularité de n’être pas divisée en actes, mais seulement interrompue à deux reprises par une pause, et une traduction en vers des Psaumes non traduits par Marot…qui parut aux juges impartiaux inférieure encore à celle qu’elle continuait.

    Il publia en 1560 une œuvre sous le titre Traité de l’autorité du magistrat en la punition des hérétiques. Dans ce traité Théodore de Bèze fait preuve d’un exceptionnel manque de tolérance en prônant  les châtiments les plus extrêmes contre ceux qu’il appelait les hérétiques. Il écrivit aussi une Histoire ecclésiastique des Eglises Réformées du Royaume de France (1580), où il met en exergue la portée ecclésiologique et apocalyptique du martyre. 

    Il  fut au colloque de Passy (1561) le principal orateur des réformés, puis resta en France, prêchant et suivant l’armée du prince de Condé jusqu’à la paix d’Amboise en 1563. Après la mort de Calvin (1564) dont il avait fait sa biographie (Une vie de Calvin) peu avant (1563), il hérita de son pouvoir et de son influence et demeura jusqu’à la fin, grâce à son activité, à son intelligence et à son dévouement, le docteur et le principal chef de son parti.

    Michel Escatafal