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histoire de la littérature - Page 5

  • Le théâtre dans la Rome antique

    dossenus.jpgpappus.jpgPar goût, par instinct, les Romains ont toujours aimé ce qui était dramatique. De fait la poésie qui s’est réellement imposée  l’a été à travers le théâtre, et en premier lieu dans les villages où l’on jouait les jours de fête des petites pièces improvisées, avec des gradins construits et démolis après chaque représentation. Et il a fallu attendre très longtemps pour voir construire un théâtre permanent, puisque le premier à Rome date de Pompée (68 avant J.C.) Dans ce monument seront données notamment les pièces de Plaute, Térence et Attius.

    A partir de cette époque, on joua des pièces régulières avec des comédiens professionnels, et non comme les siècles précédents avec des acteurs volontaires. Ces comédiens de profession, tous esclaves parce que le métier d’acteur était noté d’infamie, furent appelés histrions, d’un mot étrusque qui signifie baladins. Les Etrusques ont été en effet des précurseurs dans le théâtre à Rome, car c’est eux qui mirent véritablement à la mode la musique dans les représentations, puis des danses (365 avant J.C.). En outre il faut noter que les troupes professionnelles ne comportaient pas de femmes, les héroïnes des tragédies ou des comédies étant représentées par de très jeunes esclaves.

    Si le théâtre était contrôlé par des magistrats ou des édiles, afin de s’assurer que le poète ne s’était permis aucune allusion aux affaires publiques,  en fait l’organisation des spectacles appartenait aux directeurs de troupes, lesquels le plus souvent avaient été eux-mêmes acteurs.  Il faut noter aussi qu’il n’y avait dans le théâtre que des places gratuites, ce qui explique la forte affluence à chaque représentation, au demeurant assez rares. Bien entendu le public était placé selon des critères bien définis, avec aux premiers rangs des gradins les chevaliers et les personnages de marque, la plèbe s’entassant comme elle pouvait aux derniers étages. On notera au passage que vingt siècles plus tard, rien n’a vraiment changé.

    Les pièces qui étaient joués étaient essentiellement des  imitations de la tragédie et de la comédie grecque, et elles portaient le nom de tragédies ou de comédies à pallium en fonction des vêtements que portaient les acteurs. Certains de ces acteurs eurent ensuite l’idée de faire entrer des sujets et des personnages empruntés à la vie de Rome, tout en conservant le cadre tracé par les Grecs. On eut alors ce que l’on a appelé la comédie à toge (vêtement national des Romains), et la tragédie à prétexte, parce que la robe bordée d’une bande de pourpre (praetexta) était le costume distinctif des magistrats et des patriciens.

    Le succès de ces pièces d’inspiration athénienne, même élargie aux personnages romains, ne fit pas oublier les joies que procuraient aux temps anciens les bouffonneries des villages. C’est ainsi que des atellanes ou des mimes servaient parfois d’intermèdes aux pièces de forme classique. L’atellane est une sorte de parade improvisée par les acteurs à partir d’un canevas arrêté à l’avance. A chaque emploi est attaché un masque, toujours le même, qui fait connaître par avance le caractère de celui qui le porte.

    Parmi les plus célèbres on peut citer Maccus, sorte de rustre niais et glouton, ancêtre du polichinelle napolitain, mais aussi Bucco, vantard et grossier, Panniculus, un vaurien leste et entreprenant, Dorsennus, un bossu pédant et filou, ou encore Pappus, une ganache solennelle et grotesque. Dans ces petits drames, qui se passaient le plus souvent à la campagne, il n’y avait évidemment point de complications dans l’intrigue. En fait ils n’étaient égayés que par les inspirations des acteurs et les saillies du dialogue.

    Le mime ne différait guère de l’atellane, mis à part que le masque n’était pas fixe. D’autre part, au lieu des mœurs campagnardes, on peignait plutôt la vie des artisans des villes. En outre, dans ces œuvres, tous les rôles étaient subordonnés à celui d’un personnage principal, l’archimime, les autres acteurs ne servant qu’à lui donner la réplique.

    Michel Escatafal

  • L'autre Balzac

    guez de balzac.jpgJean-Louis Guez de Balzac est né en 1594 à Angoulême, ville où il est mort en 1654. De 1611 à 1622 il remplit plusieurs fonctions à l’étranger et fut nommé par Richelieu, à son retour à Paris, Conseiller d’Etat et historiographe de France. Il dut cette nomination au fait que ses Lettres l’avaient fait connaître. Ensuite, dès 1634, il fut choisi pour faire partie de l’Académie française, mais ne quitta point pour cela sa terre de Balzac en raison d'un état de santé délicat.

    Il n’en fut pas moins l’oracle de toute la société polie du temps. Le premier, en effet, il trouva la forme définitive de la prose française, et il suffit de comparer son style et celui des auteurs qui l’ont suivi avec celui des derniers écrivains du seizième siècle,  pour voir quelle grande place il tient dans l’histoire de notre langue et de notre littérature.

    Malgré tout il faut avouer que la postérité n’a pas eu tort de mettre au second rang , bien loin après les lettres d’une Madame de Sévigné par exemple, ces Lettres que Guez de Balzac travaillait comme des morceaux d’éloquence, et dont le ton ne paraît pas toujours bien naturel. Cependant elles  sont loin d’être vides de pensées,  et un grand nombre d’entre elles forment une source importante à consulter pour l’histoire du temps.

    Dans ses Lettres par exemple, on découvre sous un autre angle le différend entre Corneille et Georges de Scudéry (1601-1667), qui fut son ami avant d’être son rival, lui-même auteur de plusieurs tragédies et tragi-comédies.  On y décrit également un personnage comme Nicolas-Claude Fabri de Peiresc (1580-1637), conseiller au parlement d’Aix, illustre érudit français qui, s’intéressant également à l’histoire, à la philologie, à l’archéologie, à la géographie, à l’histoire naturelle, mit avec un dévouement inépuisable sa fortune et ses efforts au service de la science et des savants.

    Outre ses Lettres, Balzac a laissé trois traités de morale mondaine, religieuse et politique, Aristippe, le Socrate chrétien, le Prince, dans lesquels il trouve souvent la juste expression de pensées élevées, à défaut d’être originales. Dans le Socrate chrétien, j’ai bien aimé l'évocation de l’empereur romain Tibère (successeur d’Auguste en 14), qui donne témoignage des tourments de cet empereur qui ne voulait pas l’être. Cela ne l’empêcha pas de gouverner longtemps avec  clairvoyance et équité quoiqu’aient pu en dire Tacite et Suétone, ces derniers faisant de lui le bouc expiatoire de tous les vices de Rome à l’époque, mais qui finit sa vie frappé dans un enfer de malheurs et de trahison.

    Michel Escatafal

  • François de Sales, un esprit juste et raisonnable

    François de Sales.jpgNé en 1567 au château de Sales, près d’Annecy, François de Sales entra dans les ordres en 1595. Ensuite il fut nommé évêque de Genève en 1602, et résida en cette qualité à Annecy. Il mourut à Lyon en 1622 et fut canonisé en 1665. Ses écrits, d’une grâce un peu molle et qui ne sont pas toujours exempts de mauvais goût, révèlent une âme d’une grande douceur, et souvent un esprit pénétrant et moraliste.

     

    Le plus célèbre d’entre eux est l’Introduction à la vie dévote (1608) dans laquelle on retrouve des phrases comme celle-ci : « Nous ne sommes hommes que par la rayson, et c’est pourtant chose rare de trouver des hommes vrayement raysonnables ». On y trouve aussi d’étranges affirmations, telle que : « Nous sommes comme les perdrix de Paphlagonie (pays d’Asie Mineure) qui ont deux cœurs… », empruntée à l’Histoire naturelle de Pline et qu’on rencontre également dans le livre De la nature des animaux du compilateur grec Elien (3è siècle après J.C.), mais aussi dans les Nuits attiques du grammairien romain Aulu-Gelle (vers 115-180).

     

    A cette œuvre, il faut joindre le Traité de l’amour de Dieu (1616), des Sermons, et des Lettres, la plus connue étant celle à Mademoiselle de Soulfour, qui était une religieuse de la communauté des Filles-Dieu à Paris. A noter que cette communauté dépendait de la célèbre abbaye de Fontevrault, et François de Sales avait beaucoup contribué à en rétablir la régularité et la prospérité.

     

    Ce dernier eut aussi une grande influence sur l’âme de Mme de Chantal (1572-1641), grand’mère de Madame de Sévigné. Il l’associa à plusieurs de ses œuvres et la mit à la tête de l’ordre de la Visitation, fondé par lui à Annecy en 1610.

     

    Michel Escatafal

  • Un soldat et un courtisan qui a su parler des plus célèbres personnages de son temps

    brantôme.jpgPierre de Bourdeille, qui prit le nom de Brantôme, d’une abbaye dont il avait le bénéfice, quoique laïque, est né vers 1540 en Périgord et mort en 1614. Soldat, il guerroya contre les huguenots, les Turcs et les Maures, mais aussi courtisan, il se retira dans ses terres après la mort de Charles IX (1574) et s’y occupa de consigner par écrit tout ce qu’il avait su ou appris de curieux sur les plus célèbres personnages de son temps.

     

    De là est née son œuvre : des Grands capitaines françois où il évoque notamment M. le connestable messire Anne de Montmorency (1492-1567) ou encore le grand roy Henry II (1519-1559), des Grands capitaines étrangers, des Dames par exemple Marie-Stuart (1542-1587) quittant la France (discours III sur la reyne d’Escosse, jadis reyne de nostre France), recueils précieux par le grand nombre d’anecdotes qu’ils contiennent et les renseignements que nous y pouvons puiser, pour reconstituer l’histoire de la vie élégante au XVIè siècle. Il faudra toutefois attendre le XVIIIè siècle pour que ses écrits franchissent le mur de l’histoire de notre littérature.

     

    Brantôme raconte avec une certaine vivacité, et c’est son principal mérite, certains diront même le seul. En effet, il n’a vu des évènements qui s’agitaient autour de lui  que la surface, et l’on chercherait vainement chez lui l’expression d’une pensée quelque peu originale ou profonde. Pour les critiques les plus sévères il fut surtout un bavard impénitent.

     

    Michel Escatafal

  • Le plus célèbre des pamphlets : la Satire Ménippée

    Satire Ménippée.jpgLe philosophe cynique Ménippe, Grec de Syrie, qui vivait au 4è ou au 3è siècle avant l’ère chrétienne, avait laissé une réputation presque légendaire de satirique spirituel et audacieux. Il avait d’ailleurs publié un recueil de satires qui devinrent des modèles du genre. Ainsi l’érudit Varron (116-27), que certains ont appelé « le plus savant des Romains », avait écrit des satires à la manière de Menippe. C’est du même souvenir que se sont inspirés les auteurs du plus célèbre de tous les pamphlets qui ont été publiés pendant la Ligue, la Satire Ménippée du catholicon double d’Espagne et des Etats de la Ligue, œuvre littéraire de grande valeur qui a contribué à ramener les esprits de l’époque à plus de tolérance.

    Cette satire met d’abord en scène deux charlatans, l’un Espagnol, l’autre Lorrain, symbolisant le roi d’Espagne, Philippe II, et le duc de Mayenne, de la maison de Guise et de Lorraine, avec tous leurs partisans, et vendant une drogue aux vertus merveilleuses, le catholicon double d’Espagne. Puis la satire fait défiler dans la plus véridique et la plus comique des descriptions, la procession ordonnée par la Ligue avant l’ouverture des Etats. Enfin la salle même des Etats ayant été décrite, avec ses tapisseries allégoriques, dont les malicieux écrivains inventent les sujets, afin d’y trouver plus sûrement matière à railleries ironiques, la satire rapporte les discours plus ou moins longs, plus ou moins risibles des différents orateurs qui se sont fait entendre aux Etats. Parmi ceux-ci, on notera en dernier lieu celui de M. d’Aubray parlant pour le Tiers Etat, protestation abondante et, par endroits, chaleureuse du bon sens et de l’honnêteté.

    L’idée première de la Ménippée peut-être attribuée avec une quasi certitude à un certain Pierre Leroy, chanoine de Rouen, « homme honorable et très ennemi des factions », comme le décrit de Thou dans son Histoire. Ce dernier fait aussi allusion à un autre écrivain qui aurait porté à sa perfection le dessein de Le Roy. Dans ce collaborateur essentiel, il faut probablement (mais pas sûrement) reconnaître l’illustre jurisconsulte Pierre Pithou (1539-1596), qui serait particulièrement l’auteur de la Harangue de M. d’Aubray.

    En outre le poète Nicolas Rapin ((1540-1608), qui avait été grand prévôt de la connétable de Paris, et s’était battu plus tard à Ivry, dans les rangs de l’armée royale, mais aussi Jean Passerat (1534-1602), professeur au Collège Royal (Collège de France), prirent pour eux le soin d’écrire les vers de la Satire, auxquels se joignit un peu plus tard une ingénieuse pièce de Gilles Durant (1550-1615), avocat au Parlement de Paris qui cultivait la poésie. Cette pièce est une satire fine et naïve dirigée contre la Ligue, intitulée : A mademoiselle ma cousine sur le trespas de son asné, regret funèbre.

    On regarde enfin comme ayant collaboré à cette œuvre collective et anonyme Jacques Gillot, conseiller clerc au Parlement, chez lequel tous les autres se réunissaient, et l’érudit Florent Chrestien (1540-1596), ancien précepteur, sans oublier…Henri IV. Les Etats de la Ligue avaient eu lieu en février 1593, et la Satire parut datée de cette même année, mais elle ne fut publiée qu’en 1594, c’est-à-dire après la conversion et le sacre d’Henri IV, quand ce roi était déjà dans Paris ou tout près d’y entrer. Elle fut d’abord intitulée la Vertu du Catholicon d’Espagne, puis l’année suivante après la soumission de Paris, on ajouta à cette brochure un Abrégé des Estats de la Ligue, le tout recevant le nom de Satire Ménipée.

    Michel Escatafal