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littérature - Page 24

  • Pierre Larivey, créateur de la comédie en France

    larivey.jpgNous savons peu de chose de la vie de Pierre Larivey, sinon qu’il est né à Troyes autour des années 1540, sans doute en 1541, et qu’il est mort  pour certains vers 1612, et pour d’autres en 1619. Ce dont on est sûr en revanche est qu’il fut chanoine de Saint-Etienne de Troyes, mais aussi astrologue. D’origine italienne, son nom n’étant que la traduction du surnom de giunto (arrivée), les neuf comédies qu’il a laissées sont toutes imitées de l’italien, ou par quelque emprunt direct  du latin. Parmi ces neuf comédies, six dont les Esprits ont été publiées en 1579, les trois autres en 1611.

    Cette comédie des Esprits  est la plus vive et la plus intéressante des comédies françaises du seizième siècle. Elle est presque traduite d’une comédie de Laurent (Lorenzino) de Médicis. Ce Laurent est celui qu'Alfred de Musset a mis en scène sous le nom de Lorenzaccio, et qui assasina par haine de la tyrannie, son parent Alexandre de Médicis. Il périt lui-même assassiné en 1548. Dans les Esprits, nous trouvons des scènes imitées de l’Aululaire de Plaute et des Adelphes de Térence, dont Molière reprendra plus tard le dessin dans l’Avare et l’Ecole des Maris. Nous avons encore de Larivey la traduction d’un recueil de nouvelles du conteur italien Straparola, né en 1480 et mort à Venise dans le second tiers du seizième siècle, vers 1558.

    Michel Escatafal

  • La seconde partie du Siècle d’Or en Espagne

    comedia.jpgLes règnes de Philippe II (1556-1598), Philippe III (1598-1621), et Philippe IV (1621-1665) sont ceux de l’apogée de la littérature espagnole, celle-ci très liée à l’histoire du pays. Non seulement la langue atteint sa perfection classique, mais plus que jamais cette époque abonde de grands écrivains, ceux-ci formant une brillante pléiade des plus grands génies qu’ait produit la littérature espagnole. Parmi ceux-ci nous citerons aujourd’hui Cervantes, Calderon de la Barca, Gongora, Quevedo, Gracian et Lope de Vega.

    Le théâtre populaire, libre et plein de vie, rencontre un énorme succès. Il anticipe sur tous les autres genres littéraires,  même si la poésie fait un effort notable de rénovation. Si en prose  on enregistre une brève floraison de littérature mystique,  le roman pastoral se substitue à celui de la chevalerie, mais cette période est avant tout celle de l’essor du roman réaliste ou picaresque. A ce propos il faut noter que si le roman picaresque n’est pas seulement chose espagnole, l’Espagne en est sa terre d’élection.

    Alors triomphe le style maniéré, la préciosité,  laquelle dans ses deux formes, le cultéranisme de Luis de Gongora et le conceptisme de Quevedo, envahit la quasi-totalité de la production littéraire et des auteurs à de rares exceptions. Cela dit ces exceptions concernent Lope de Vega et Cervantes qui méritent à eux seuls tout un chapitre.  On soulignera seulement  à propos de Cervantes que son  Don Quichotte est à la fois le dernier des romans de chevalerie et le premier des romans modernes. Il occupe évidemment une place à part dans le genre de la prose en Espagne. Nous aurons l’occasion d’y revenir plus tard.

    Michel Escatafal

  • Clément Marot, l'éternel poursuivi

    clément marot.jpgClément Marot est né à Cahors en 1497 et à la mort de son père, le poète Jean Marot,  il hérita de la charge de valet de chambre de François 1er. Il combattit à Pavie en 1525 où il fut fait prisonnier. Rentré en France il connut l’infortune d’être suspect d’hérésie, ce qui lui valut d’être emprisonné à deux reprises en 1526 et 1527. Poursuivi de nouveau en 1535, il dut se réfugier à la cour de Marguerite de Navarre, au service de laquelle il avait été attaché, puis s’enfuit un peu plus tard en Italie (Ferrare puis Venise), avant de rentrer de nouveau en France en en 1536.

    Hélas pour lui, en 1543, la Sorbonne condamna une traduction en vers de cinquante Psaumes de David qu’il venait tout juste de publier, mais que les Réformés avaient adoptée  pour leurs offices. Cette traduction se caractérisait à la fois par son exactitude, et  par la variété et la nouveauté des rythmes. Il partit donc pour Genève, ce qui ne l’empêcha pas d’être inquiété de nouveau…par les protestants, ce qui le contraint à s’exiler une fois encore en Italie où il mourut en 1544.

    Editeur du Roman de la Rose et des œuvres de Villon, Clément Marot se rattache entièrement à l’âge qui vient de s’écouler. On ne trouve pas chez lui une grande richesse de vocabulaire, ni cet éclat des images que Ronsard et ses amis allaient ramener dans la poésie, mais il s’inscrira dans la culture délicate des écrivains du groupe de Marguerite. Ses meilleures poésies sont marquées par une grâce aisée et naturelle que l’on retrouve dans ses épîtres, élégies, ballades et  épigrammes.

    Parmi celles-ci il en est une que je veux citer sur la reine de Navarre :

    Entre autres dons de graces immortelles,

    Ma Dame escript si hault et doucement,

    Que je m’estonne en voyant choses telles

    Qu’on n’en reçoit plus d’esbahissement.

    Puis quand je l’oy parler si sagement,

    Et que je voy sa plume travailler,

    Je tourne bride(1) et m’esbahy comment

    On est si sot de s’en esmerveiller.

    (1) Je tourne bride signifie je change de sentiment.

    Michel Escatafal

  • Marguerite de Navarre (1492-1549)

    marguerite d'angoulême.jpgMême si elle ne peut pas être considérée comme un de nos plus grands  écrivains, ses œuvres étant trop souvent écrites dans un style un peu mou et prosaïque, Marguerite de Navarre n’en demeure pas moins un des personnages les plus importants de notre histoire littéraire. Il est même permis de dire qu’elle demeure la figure la plus attachante, mais aussi la plus caractéristique de la première période de la Renaissance française.

    Avant d'évoquer le rôle éminent qu’elle a tenu auprès des poètes et des écrivains de son époque, il faut d’abord préciser que Marguerite d’ Angoulême était le sœur ainée de François 1er, qu’elle s’est mariée en premières noces au duc d’Alençon en 1509 et, en secondes noces  au roi de Navarre, Henri II d’Albret,  en 1527. Sa cour se situait à Nérac (Lot et Garonne),  et ce fut souvent  un asile pour les écrivains que leurs opinions religieuses exposaient à être inquiétés en France.  Elle-même d’ailleurs s’intéressa de près aux débats théologiques que la réforme commençait à faire naître.

    Egalement éloignée d’une docilité aveugle et de l’esprit de contention, c’est dans le seul amour de Dieu qu’elle pense pouvoir trouver la solution à toute difficulté et le principe de toute conciliation. Ce platonisme mystique  et chrétien trouve son expression dans l’Heptaméron (1558), recueil de contes en prose composés à l’imitation de ceux de Boccace (1313-1375), l’auteur du Décameron. Mais ce sont surtout ses poésies, celles publiées de son vivant, les Marguerites de la Marguerite des Princesses, et celles qui étaient restées inédites jusqu’à la fin du 19è siècle, la Comédie jouée au Mont-de-Marsan et le grand poème des Prisons qui en sont inspirées.

    Michel Escatafal

  • La littérature espagnole pendant le règne de Charles Quint (entre 1516 et 1555)

    bernal diaz.jpgCe temps est le plus glorieux de l’histoire de l’Espagne, celui où elle est au sommet de sa puissance et aspire à la domination universelle. Nous sommes en plein dans l’élan de la renaissance, et tout annonce le Siècle d’Or de la littérature espagnole qui va s’étendre sur plus de 150 ans, entre 1516 et 1680, et concerner à la fois la poésie, la prose et le théâtre.

    Parmi les poètes, le catalan Juan Boscan (1490-1552) est le premier à user systématiquement des formes italiennes (sonnets, chants, etc.). Son principal mérite est d’avoir publié à la fois les œuvres de ses amis et les siennes. Garcilaso de la Vega (1503-1536), éminent et infortuné poète, mort à 33 ans,  a trouvé le temps d’écrire trois églogues, cinq chants, deux élégies, une épître et trente sept sonnets. Les eglogas (églogues) et les sonetos (sonnets), écrits avec  délicatesse et une élégance sobre et raffinée, sont les œuvres majeures de Garcilaso.  Elles se caractérisent par l’harmonie qui est la marque de fabrique de l’auteur, mais aussi par beaucoup de fraîcheur, de charme et de mélancolie.

    La prose se retrouve dans le genre didactique et moral, mais aussi dans le roman et l’histoire. Le maître de la prose didactique et morale est Antonio de Guevara, évêque de Mondonedo (vers 1481-1545), styliste éminent, un des créateurs de la prose moderne en Espagne, auteur du Relox de principes et du très connu Menosprecio de Corte y alabanza de aldea que l’on pourrait traduire par Mépris de la Cour et éloge du village. Dans ses Cartas familiares il se révéla comme le fondateur du journalisme dans le pays. Il fut aussi le précurseur du conceptisme, style littéraire espagnol caractérisé par un maniérisme excessif,  illustré par Aviso de privados y doctrina de cortesanos, que l’on date de 1539. A l’inverse, Juan de Valdés (mort en 1545), secrétaire de l’Empereur, auteur du Dialogo de Mercurio y Caron et du Dialogo de la lengua, est le premier et le plus connu des hétérodoxes espagnols. Son style était à la fois d’une remarquable simplicité et d’une grande clarté.

    Durant le règne de Charles-Quint, le roman le plus en vogue fut celui de la chevalerie. On écrivit nombre de suites et d’imitations du premier et du plus important roman de ce type, l’Amadis, qui eut pas moins de trente éditions entre 1510 et 1587. A noter que cette œuvre avait comme source le roman français de la Table ronde, transmis dans la Péninsule ibérique par les Provençaux.

    La grandeur espagnole et la conquête de ce qu’on appelait les Indes suscitent de nombreuses vocations historiques, surtout la conquête qui est un sujet ou se mêlent la polémique et la passion. Parmi ceux qui ont marqué cette époque, il y a Bartolomé de las Casas (1475-1566), Francisco Lopez de Gomara (1510-1560) et surtout le compagnon de Cortés, Bernal Diaz del Castillo, dont la très intéressante histoire de la conquête de la nouvelle Espagne  (Historia Verdadera de la Conquista de Nueva Espana) est un récit des propres aventures d’un des soldats ayant participé à la conquête de Mexico (1521).  Enfin il faut aussi mentionner Diego Hurtado de Mendoza (1503-1575), auteur de la Guerra de Granada.

    Tout annonce à cette époque là  le prochain développement du théâtre national, dont le caractère réaliste et poétique s’affirme déjà dans les œuvres des successeurs de Juan del Encina. Bartolomé Torres Naharro (mort en 1531) joue parfaitement le rôle du Gracioso (bouffon) dans les six comédies qu’il réunit dans sa Propaladia publiée sans doute en 1563, où il expose aussi ses théories dramatiques. Gil Vicente (1469-1539) rencontre un grand succès avec ses Autos y Representaciones (sentences et représentations) populaires et poétiques.

    Michel Escatafal