Né à Paris en 1655, mort en 1709 au château de Grillon (près de Dourdan), Jean-François Regnard qui a bénéficié très jeune de la fortune laissée par son père, a passé une bonne partie de sa jeunesse à parcourir la moitié de l’Europe entre 1675 et 1683, ce qui lui valut aussi en 1678 d’être pris par des pirates et vendu comme esclave à Alger. Il appartient par ses comédies à ce groupe intéressant d’auteurs comiques, dont les pièces nous représentent fidèlement les changements qui s’accomplirent dans les mœurs sociales, pendant les trente dernières années du siècle de Louis XIV. Cela dit, il n’a produit aucune œuvre qui puisse se comparer, pour l’âpreté satirique et la peinture sérieuse des caractères, avec le Turcaret de Le Sage (1709), ou qui jette autant de lumière sur la société du temps que certaines pièces de Dancourt.
A propos de Dancourt (1661-1725), notons qu’il fut comédien en même temps qu’auteur de comédies, et qu’il a surtout excellé dans la peinture des bourgeois et de ceux que l’on appelait « les petites gens ». Il y déployait beaucoup de verve et d’aisance, au point qu’on puisse louer comme une œuvre vraiment profonde son Chevalier à la mode (1687), comédie en cinq actes et en prose qui, dans toute la période allant de Molière à Marivaux, ne le cède qu’à Turcaret.
Pour revenir à Regnard, il a pour lui, avec l’aisance du dialogue et de la versification, une gaieté que rien ne déconcerte. C’est par ces qualités que brillent ses principales comédies, le Joueur (1696), où l’on trouve le caractère le plus approfondi qu’ait tracé Regnard, le Distrait (1697), Démocrite (1700), les Folies Amoureuses (1704), les Ménechmes (1705), le Légataire universel (1708), sans doute son chef d’oeuvre. Regnard a aussi écrit un assez grand nombre de farces pour les Comédiens Italiens, et publié une narration romanesque de ses voyages, notamment la Provençale, roman posthume qui paraîtra en 1731. Autant de raisons d'affirmer qu'il mérite de figurer parmi les meilleurs imitateurs de Molière, lui empruntant des idées, des procédés ou des jeux de scène, mais avec sa note à lui.
Un dernier mot enfin, pour souligner que les Comédiens Italiens furent établis à Paris d’une manière permanente à partir de 1662. Quand l’ancienne troupe de Molière et celle de l’Hôtel de Bourgogne se réunirent pour constituer la Comédie Française (1680), les Italiens prirent pour eux la salle de l’Hôtel de Bourgogne. Dès lors s’établit entre les deux théâtres une sorte de rivalité, qui se termina tout d’un coup en 1697, quand les Italiens, pour des raisons qui ne sont pas bien éclaircies, se virent interdire de continuer leurs représentations. Toutefois cette rivalité recommença très vite, les théâtres populaires de la Foire Saint-Laurent et de la Foire Saint-Germain ayant repris pour eux le répertoire et les traditions des Italiens.
Michel Escatafal
Commentaires
Je vous vante pour votre exercice. c'est un vrai travail d'écriture. Poursuivez .