Née en 1635, à la prison de Niort, geôle de son père qui était le fils du poète Agrippa d’Aubigné, Françoise d’Aubigné, veuve du poète Scarron (1610-1660) qu’elle avait épousé en 1652, sut conquérir l’estime des personnages les plus distingués de son temps, et par-dessus tous les autres de Louis XIV, lequel la nomma marquise de Maintenon en 1674. Il l’épousa secrètement en 1684, un peu plus d’un an après la mort de la reine Marie-Thérèse. Cela ne lui conféra pas pour autant une influence considérable sur les affaires politiques et religieuses du royaume, contrairement à une légende tenace qui lui attribue notamment la décision ayant conduit à la révocation de l’édit de Nantes en 1685, ce qui eut pour effet de provoquer un exode massif des protestants…et de leurs capitaux.
A propos de cet épisode douloureux de notre histoire, aujourd’hui tous les historiens semblent d’accord pour minimiser le rôle de Madame de Maintenon, ne serait-ce qu’en raison de son passé calviniste. En effet, même si elle est née catholique, elle passera l’essentiel de sa prime jeunesse chez une tante huguenote qui lui fera partager sa foi jusqu’au moment où, après la mort de son père, elle sera placé chez les Ursulines qui la reconvertiront au catholicisme. En revanche nul ne conteste son influence sur la Cour de Louis XIV, à qui elle a imposé une ère de rigueur et d’austérité qui contrastait avec le caractère volontiers volage de son auguste époux.
Douée d’un esprit solide, sinon très élevé, habituée à compter avec les difficultés de la vie, ne serait-ce qu’au moment de la mort de son mari où elle se retrouva sans le sou alors qu’elle n’avait que vingt-cinq ans, elle a consacré le meilleur de son temps et de ses soins à la fondation et à la direction de cette maison de Saint-Cyr, où devaient être élevées gratuitement deux cent cinquante jeunes filles nobles et pauvres. Les demoiselles de Saint-Cyr nous ont elles-mêmes conservé ses Entretiens, remplis d’utiles conseils, qui s’appuient souvent sur des souvenirs personnels. Il faut y ajouter ses Conversations et ses Proverbes, espèces de dialogues et de petits drames moraux, et ses Lettres, dont un très grand nombre sont relatives à Saint-Cyr ou à l’éducation des filles. Aucune de ces œuvres n’assure à Madame de Maintenon une place parmi nos plus grands écrivains, mais nul pédagogue ne s’est montré plus libre de tout préjugé systématique ou romanesque, nul n’ a eu plus qu’elle le sentiment de la réalité, ne s’est plus attaché à fonder toujours sur l’expérience des enseignements empreints de modération et de bons sens. Elle mourra le 15 avril 1719 dans cette maison de Saint-Cyr qu’elle a immortalisée.
Parmi les Lettres sur l’éducation, j’ai retenu celle écrite à Madame de Gruel, qui était Dame de Saint-Cyr, maîtresse des « rouges », c’est-à-dire des élèves âgées de moins de dix ans, où Madame Maintenon évoque la nécessité de la douceur dans l’éducation des enfants. Elle dit notamment à Madame Gruel : « Vous parlez à vos enfants avec une sécheresse, un chagrin, une brusquerie qui vous fermera tous les cœurs ; il faut qu’elles sentent que vous les aimez, que vous êtes fâchée de leurs fautes pour leur propre intérêt, et que vous êtes pleine d’espérance qu’elles se corrigeront ; il faut les prendre avec adresse, les encourager, les louer, en un mot il faut tout employer, excepté la rudesse, qui ne mène jamais personne à Dieu. Vous êtes trop d’une pièce, et vous seriez très propre à vivre avec des saints ; mais il faut savoir vous plier à toutes sortes de personnages, et surtout à celui d’une bonne mère qui a une grande famille qu’elle aime également ».
Michel Escatafal
Commentaires
Je vous félicite pour votre exercice. c'est un vrai travail d'écriture. Développez .
Je vous vante pour votre exercice. c'est un vrai exercice d'écriture. Poursuivez .