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Montchrestien, poète tragique disciple de Garnier

montchrestien.jpgNé à Falaise (Calvados)  dans la seconde moitié du seizième  siècle (peut-être en 1575), Antoine  Mauchrétien, qui prit le nom de Montchrestien auquel il ajouta celui d’une terre de Vasteville appartenant à sa femme, eut une vie  très  agitée, et qui n’est pas connue avec une pleine exactitude. Forcé de s’enfuir en Angleterre à la suite d’un duel, il y trouva un bon accueil auprès de Jacques 1er (roi d’Angleterre et d’Irlande entre 1603 et 1625) à qui il dédia (1601) sa tragédie de l’Escossoise (Marie Stuart) ou le Désastre, publiée à nouveau en 1604 sous le titre la Reine d’Escosse, et grâce auquel il obtint de pouvoir rentrer en France. Il se fixa à Châtillon-sur-Loire (Loiret), et s’y occupa de travaux de métallurgie. Ensuite,  mêlé à la révolte du duc de Rohan (1621), il se mit à la tête d’une petite armée protestante en Normandie, et fut surpris et tué  dans le village de Toureilles (Orne). Cette affaire a été racontée par Malherbe dans une lettre à Peiresc du 14 octobre 1621.

Il a laissé, outre la tragédie évoquée précédemment, un Traité de l’OEconomie politique, dont le titre même est remarquable, n’ayant jamais été employé auparavant, cinq autres tragédies, la Cartaginoise (Sophonisbe) ou la Liberté, les Lacènes ou la Constance, David ou l’Adultère, Aman ou la Vanité, Hector. A cela, il faut ajouter un poème, Susanne ou la Chasteté, et quelques poésies. Comme poète tragique, Montchrestien appartient à l’école de Garnier, dont il n’égale pas l’éclat, mais sa forme, plus molle que celle de son devancier, est aussi plus pure. Montchrestien paraît avoir recherché, pour ses vers, les avis et l’approbation de Malherbe, une des plus grandes figures de l’histoire de notre littérature.

Parmi les meilleurs textes de Montchrestien, je citerais la mort de Marie Stuart  que l’on trouve à l’acte V de la Reine d’Escosse, où celle-ci montre son courage et son mépris de la mort au moment de son exécution (1587) décidée par la reine Elisabeth 1ère. Déjà, la description de la montée à l’échafaud où elle paraît souriante « un peu de l’œil et de la bouche » paraît émouvante. Ensuite, voyant qu’on ne lui accorde pas un confesseur comme elle souhaiterait qu’il fût, elle décida de se confesser elle-même et se mit à prier. A ce propos, dans l’Histoire de Marie Stuart écrite par Mignet, on apprend que le docteur Fletcher, doyen protestant de Peterborough, s’approcha d’elle et voulut l’exhorter à mourir.

« Madame, lui dit-il, la Reine, mon excellente souveraine, m’a envoyé par devers vous ». Marie, l’interrompant à ces mots, lui répondit : « Monsieur le doyen, je suis ferme dans l’ancienne religion catholique romaine, et j’entends verser mon sang pour elle ». Comme le doyen insistait avec un fanatisme voyant, et l’engageait à renoncer à sa croyance, à se repentir, à ne mettre sa confiance qu’en Jésus-Christ seul, parce que seul il pouvait la sauver, elle le repoussa d’un accent résolu, lui déclara qu’elle ne voulait pas l’entendre, et lui ordonna de se taire. Le docteur Fletcher se mit alors à lire la prière des morts, selon le rite anglican, tandis que Marie récitait en latin les psaumes de la pénitence et de la miséricorde, et embrassait avec ferveur son crucifix.

Si le texte de Montchrestien ne rentre pas dans ces détails, il en reprend quand même les grandes lignes et, en vrai poète qu’il est, décrit la fin horrible de la reine d’Ecosse, après avoir dit au bourreau : « Arme quand tu voudras ta main injurieuse, frappe le coup mortel, et d’un bras furieux fay tomber le chef (la tête) bas et voler l’âme aux cieux ». Hélas pour Marie Stuart, le premier coup de hache ne fit que la blesser et il fallut la frapper plusieurs fois pour lui abattre la tête, ce que Montchrestien traduit ainsi : «  Un, deux, trois, quatre coups sur son col il delasche (laisse tomber) ; car le fer acéré moins cruel que son bras vouloit d’un si beau corps différer le trespas : Le tronc tombe à la fin, et sa mourante face par trois ou quatre fois bondit dessus la place ». Je ne sais pas ce que Jacques 1er, adversaire des catholiques, a apprécié réellement dans ce récit, mais il n’en voulut point à Montchrestien d’avoir glorifié la mort de Marie Stuart.

Michel Escatafal

Commentaires

  • Je vous complimente pour votre recherche. c'est un vrai exercice d'écriture. Développez .

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