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  • Lamennais, symbole de l'exaltation religieuse au dix-neuvième siècle

    lamennais.pngNé le 19 juin 1782 à Saint-Malo, mort à Paris le 27 février 1854, possédé d’une foi ardente, mais qui ne paraît s’être affermie qu’après de longs combats intérieurs, ordonné prêtre à trente-quatre ans, Hughes-Félicité-Robert de Lamennais publia en 1817, non sa première œuvre, mais celle qui devait lui assurer tout d’un coup la célébrité, le premier volume de l’Essai sur l’indifférence en matière de religion. A l’exception des livres de Bossuet, l’apologétique et la controverse modernes n’avaient encore produit aucune œuvre aussi puissante, aussi chaleureuse, aussi hardie. Le jeune écrivain se plaçait en tête des défenseurs les plus ardents des doctrines catholiques.

    Mais les volumes suivants du même ouvrage, l’attitude militante qu’il prit à l’égard du gouvernement de la Restauration, l’exaltation des doctrines politiques en même temps que religieuses qu’il soutint, après 1830, dans le journal l’Avenir, inquiétèrent la grande majorité des évêques français et le pape (Grégoire XVI) lui-même. Après une soumission plus apparente que réelle à l’autorité pontificale, Lamennais s’expose de propos délibéré à la rupture définitive en publiant ses Paroles d’un croyant (1834), dans lesquelles l’orgueil indomptable, qui perce jusque sous l’apparence de la résignation, s’unit à l’expression de la plus vive tendresse pour les malheureux et les persécutés, notamment le salariat, qui n’est à son avis qu’une aggravation de l’esclavage antique.

    Le plus important des ouvrages que Lamennais publia depuis est son Esquisse d’une philosophie (1841-1846), œuvre ambitieuse, d’une science tout à fait insuffisante, profonde par endroits, et qu’il n’a pas achevée. Il y parle, entre autres réflexions, du rire, mais aussi de la perfection de la beauté physique qui, selon ses dires, se proportionne toujours dans l’art à celle de la beauté morale. Il faut y joindre un récit intéressant et qui contient des pages admirables, Affaires de Rome (1836), mais aussi le Livre du peuple (1837), une traduction des Evangiles (1846) comme il avait traduit en 1824 l’Imitation de Jésus-Christ (fin du quatorzième siècle ou début du quinzième siècle), et des Lettres.

    Lamennais est un écrivain qui, à une fougue souvent déclamatoire, a su joindre beaucoup de netteté et de rigueur dans la discussion. Ses paraboles évangéliques sont d’une douceur et d’une poésie exquises. Il a même plus d’une fois, en dépit des tourments de son âme, atteint, à force de noblesse, à la sérénité. Mais c’est moins par ses mérites littéraires que par l’action qu’il a exercée qu’il occupe une grande place dans l’histoire du dix-neuvième siècle. Malgré ses erreurs, en effet, c’est à lui qu’il faut rattacher tout le grand travail de rénovation religieuse dont Lacordaire (1802-1861) et Montalembert (1810-1870) ont été après lui, avec plus de prudence et de mesure, les plus illustres ouvriers.

    Michel Escatafal