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  • Béranger, auteur de chansons à succès

    littérature,histoire,jean-pierre béranger,chansonsNé le 19 août 1780 à Paris, où il mourut le 16 juillet 1857, Jean-Pierre ou Pierre-Jean de Béranger,  après s’être essayé sans succès dans divers genres, commença vers 1820 à écrire des chansons, et peu à peu parvint à la célébrité et à la gloire. Il était déjà populaire quand il publia son premier recueil en 1815. La Restauration trouva en lui un adversaire : un grand nombre des chansons des recueils de 1821, 1825 et 1828, sont consacrées à la glorification des idées libérales et des souvenirs de l’Empire, ceux-ci apparaissant plus particulièrement dans une chanson intitulée Les Souvenirs du peuple.  

    Dans une autre qui a pour titre Le Vieux Sergent, il évoque les batailles de Jemmapes (victoire de Dumouriez le 6 novembre 1792), et de Fleurus (victoire de Jourdan le 26 juin 1794), fustige les généraux de Napoléon qui s’étaient ralliés à la Restauration, et qui se trouvaient alors (en 1823) engagés dans la guerre d’Espagne, entreprise pour rétablir dans ce pays le trône de Ferdinand VII. Le dernier recueil publié du vivant de l’auteur (1833) est inspiré des mêmes sentiments.

    En fait, Béranger aimait la politique, et cela se retrouve dans quelques textes de chansons comme le roi d’Yvetot, où la satire a quelque chose d’aimable et de bonhomme, ou le Ventru, sorte de compte rendu en couplets d’un député ministériel à ses électeurs, dont les traits sont bien plus âpres, plus grossiers, si l’on veut, mais singulièrement précis et capables de faire impression sur l’esprit des lecteurs ou plutôt des chanteurs improvisés et innombrables, pour lesquels surtout Béranger écrivait.

    Cela dit, il nous est bien difficile aujourd’hui, non pas de partager, mais même de comprendre l’enthousiasme qui accueillit la publication des plus célèbres chansons de Béranger, lorsque le parti bonapartiste et le parti libéral se plaisaient à saluer  en lui une sorte de poète national. Nous sommes peut-être moins sensibles que ne l’étaient nos aïeux à la justesse de tant d’idées pour la défense desquelles il fallait encore combattre alors. Béranger sut les exprimer tour à tour, et toujours avec la même aisance, d’une manière piquante, familière ou noble. En revanche nous sommes choqués, peut-être plus qu’il ne le faudrait de quelques métaphores, de quelques périphrases, de quelques inversions vieillies.

    Mais nous savons encore apprécier cette heureuse variété dans le ton et dans les sujets qui distingue tout d’abord Béranger des plus fameux chansonniers qui l’ont précédé. Cette variété se retrouve notamment  dans les Bohémiens,  où l’auteur chante, sous une forme originale, l’amour de l’indépendance, avec un rythme très agréable. Bref, en dépit de son vocabulaire et de ses tours, souvent prosaïques, l’habileté dont a fait preuve Béranger dans le maniement des rythmes et dans l’art de ramener un refrain presque toujours intéressant et expressif, font de cet auteur de chansons un des seuls que la postérité a classé parmi les poètes important du dix-neuvième siècle.

    Michel Escatafal

     

  • Lemercier, l’auteur d’Agamemnon

    littérature,histoire,lemercierNé le 21 avril 1771 à Paris où il mourut le 7 juin 1840, Louis-Jean-Népomucène Lemercier avait dix-sept ans quand il fit représenter sa première pièce, une tragédie en cinq actes, Méléagre. En fait il n’y eut qu’une représentation de cette pièce, due à la bienveillance de la reine Marie-Antoinette qui invita toute la Cour au spectacle. Cette protection de Marie-Antoinette avait pour origine le fait que  Lemercier eut pour marraine la Princesse de Lamballe, elle-même amie de longue date de la reine. En revanche le succès de la belle tragédie d’Agamemnon(1797), son chef-d’œuvre, ne devait rien à personne, mais simplement à la qualité de la pièce. En 1801, Lemercier donna dans un genre nouveau, avec Pinto, ou la Journée d’une conspiration, sorte de comédie historique qui semble encore assez intéressante aujourd’hui, même si on ressent un manque d’ingéniosité et de vivacité dans l’agencement de l’intrigue et l’invention du dialogue.

    Ses deux comédies en vers, Plaute (1808) et Christophe Colomb (1809), et son étrange poème, la Panhypocrisiade, ou le  Spectacle infernal du seizième siècle, comédie épique en seize chants (1819), attestent encore, sinon de la souplesse et la finesse du talent de Lemercier, du moins de son louable désir de sortir des sentiers battus et d’ouvrir des voies nouvelles à la poésie et à l’art dramatique. Cela étant, la langue de Lemercier dans la Panhypocrisiade, comme d’ailleurs dans la quasi-totalité de son œuvre, est à la fois gauche, pauvre et prosaïque, ce qui affaiblit singulièrement l’intérêt de la comédie et les pensées qu’il y développe. Deux vers du deuxième chant de La Panhypocrisiade, ou le Spectacle infernal du seizième siècle (La fourmi et la mort) résument à eux seuls ces restrictions : « Quel pouvoir a, du sol agitant la surface,/Subverti nos états et la terrestre masse » ? Rien n’est beau dans ces vers, y compris l’emploi du mot subverti !

    Ce poème est le long récit d’une comédie dont le sujet est l’histoire de Charles-Quint et de son siècle. Lemercier assimile le mot Panhypocrisiade à un poème sur l’hypocrisie sous toutes ses formes, et il laisse pressentir que c’est celle de ses contemporains, non moins que celle des siècles passés, qu’il veut décrier et bafouer. Au reste il a publié quelques années plus tard (en 1832) une suite en quatre chants  de cet ouvrage un peu particulier, aux attributs romantiques, que Victor Hugo avait qualifié de « sorte de chimère littéraire ».

    Lemercier n’en compta pas moins parmi les adversaires les plus résolus des poètes romantiques, dont les hardiesses l’effrayèrent peut-être, sans qu’il ait été sensible au charme et à l’éclat de leur versification. Tout le monde s’est plu à honorer chez Lemercier, à l’égal du talent, la haute probité du caractère et l’indépendance qu’il sut garder à l’égard du gouvernement révolutionnaire et du gouvernement impérial, quoiqu’il aimât la liberté et qu’il admirât le génie de Napoléon.

    Michel Escatafal